• (♫ Non, je ne regrette rien ♪ d'Édith Piaf, je suis plutôt satisfait de ce que j'ai pris pour mon hivernage..)


    Image illustrative d'un coucher de soleil (il est 15h) qui surpasse une photo de malle...Aujourd'hui, j'en suis à mon 200è jour d'absence de ma maison et de ma petite famille, absence qui durera 400 jours environ (mais en Antarctique, pas de pronostic...). Arrivé donc à la moitié, je pense avoir assez de recul pour faire le point sur ce que j'ai mis dans mes bagages... Peut-être que cela aidera les prochains hivernants à préparer les leurs. Et afin de rendre lisible cette liste à la Prévert, je vais la couper en plusieurs secteurs :
    Tout d'abord, sport et habillement. Je n'ai pas regretté d'avoir pris mon matériel de ski de fond, je m'en sers dès que je peux. J'ai bien apprécié les bâtons de marche (deux paires), les gants moufles rétractables (chauds et très pratiques pour prendre les photos), la doudoune -10°C MH500 de chez décathlon qui est vraiment chaude (quoiqu'un peu fragile au déchirement), les chaussures de raquettes à neige (D4 SH520 - qui ont fait que je n'ai pas encore utilisé mes Sorels), mes baskets de trail que j'ai mises beaucoup pour passer « l'été », la cagoule vélo softshell, la frontale, une bouteille thermos. Mon filet à linge pour préserver des lavages agressifs.
    Ce qui m'a manqué : peut-être un sac à dos style canyoning (assez grand) ? Ils sont en tous cas appréciés de ceux qui en ont. Des chaussures sans lacet pour passer d'un bâtiment à un autre (chaussons de rigueur dans le séjour et le dortoir), mais depuis que Gaëtan m'a montré une technique de laçage des chaussures de sécurité fournies, c'est moins pénible. Des chaussettes basses en coton, car on ne passe pas toute sa vie dehors et le pied a tendance à s'abimer avec des chaussettes techniques... De quoi s’habiller « bien » me disaient les filles et je crois qu'elles ont raison. Et pour nettoyer tout cela de la lessive moins agressive ?

    Côté photo / audio / informatique
    La bonne idée c'est de doubler les trucs importants : téléphone portable pour la messagerie (l'un est tombé en panne le mois dernier), les appareils photos, les disques durs et les cartes SD : l'électricité statique fait des ravages (il faut penser à sauvegarder régulièrement ses images sur les disques). Le trépied photo est très utile pour les photos de nuit, aurores polaires. En revanche, j'ai oublié d'acheter des pinceaux à nettoyer les capteurs. J'ai apprécié d'avoir mon lecteur MP3.

    La nourriture
    C'est au niveau des « madeleines de Proust » qu'il faut faire un effort : pour moi c'est le chocolat en poudre et les confitures de la maison, mais pour d'autres c'est une marque de thé, de café, de plaquette de chocolat...

    La trousse de toilette :
    Bien constituée (comme le reste, j'ai une fée qui a veillé dessus...), il ne manque rien et la GP peut dépanner. Il faut penser aux crèmes à main et aussi à pied, parce qu'ils morflent. Il m'a peut-être manqué un anti-buées pour mes lunettes de vue, car le visage bien emmitouflé dégage de la buée sur les lunettes, malgré le masque, et cette buée gèle instantanément sur les verres. Pas top. J'ai une recette à base de shampoing pour palier au problème, mais ça ne tient qu'une heure ou deux... je pense qu'on peut trouver dans le commerce des produits plus efficaces.

    Autres :
    Mouchoirs et serviettes de table en tissus : pour protéger mieux l'environnement antarctique. Des sacs plastiques / poubelle pour l’étanchéité du sac banquise. Une montre tout terrain à mettre sur la veste comme les infirmières quand on est dehors. Pour moi, les livres sont en trop car il y en a plein à DDU. Pensez à amener ce qu'il faut pour assouvir votre passion, tout en gardant en tête, qu'on a pas tant de temps que cela et qu'il faut avant tout profiter du lieu. Pour moi, c'est la photo argentique.

    Une remarque pour les envois de colis : j'ai compté un peu là-dessus pour rattraper d'éventuels oublis, mais la TA71 n'a pas eu de livraison à R3 et nous, la TA72, ni à R3, ni à R4. Je pense qu'il vaut mieux ne pas compter sur les envois et bien soigner ses malles, ça met la pression, mais au moins il n'y aura pas de déception...


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  • (♫ Cargo de nuit ♪ d'Axel Bauer…)

    Les entrailles de la bêteUn des points névralgiques de la base antarctique, c'est la centrale :  elle produit chaleur, électricité et eau, grâce à des moteurs diesel qui tournent sans cesse pour répondre à la demande en fluides. Gaëtan et Vianney, respectivement Chef et second centrale veillent sur la santé de ce cœur battant, et sur les alarmes qui peuvent se déclencher à tout moment : incendie, défaut électrique, la station de pompage de l'eau de mer (SPEM) qui peut se désamorcer,  défaut de température des frigos, problème de circulation de l'eau, etc... Et comme cette surveillance doit se faire en permanence, et que nos indispensables « centraliens » ne peuvent pas veiller jour et nuit, l'équipe des huit techniques tournent à tour de rôle pour se mettre au chevet de cette mécanique complexe : c'est le quart. Quart de jour de 6h30 à 8h00 et 17h30 à 20h (sauf le dimanche, c'est punition 6h30 - 20h00) et quart de nuit de 20h à 6h30. Exceptionnellement, les non-techniques peuvent prendre un quart de nuit, et c'est mon cas pour faire un remplacement inopiné, JP prenant la première partie du quart, et moi la seconde, de 2h à 6h30. Me voici donc assis devant un tableau de voyants lumineux, le ronronnement du 6 cylindres en ligne filtré par deux portes. Toutes les deux heures, je mettrai mon casque antibruit, relever les chiffres de consommation, écouter le moteur, enfin bref, vérifier si tout va bien. Et si une alarme se déclenche, je tirerai de son sommeil le plombier, l'électricien, le chef centrale, le second centrale, selon le type d'alarme...


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  • (♫ Tempête, Francesca da Rimini ♪ de Tchaïkovski…)

    L'œil de Sauron. Non. Le mur de neige.Avec l'hiver qui s'avance, il est un phénomène que nous, météos, devons particulièrement surveiller, c'est le catabatique. En hiver, les températures sur le haut du continent antarctique deviennent très froides, jusqu'à -70°/-80°C à Concordia, par exemple. Cet air froid, plus dense que l'air plus doux, aura tendance à vouloir s'écouler vers le bas, par gravité, entrainé par son propre poids. Comme le haut du plateau antarctique se situe entre 3000 et 4000m, l'air froid va suivre les lignes de plus grande pente, comme une boule de neige va dévaler une pente montagneuse par le chemin le plus raide. D'abord animé par une petite vitesse en haut du plateau, « l'effet boule de neige » sur cet air froid, finit par lui donner des vitesses importantes à son arrivée sur l'Océan. Et pour peu qu'une petite dépression idoinement située viennent aspirer cet air froid, comme pour donner un coup de pouce, on se retrouve avec une tempête de catabatique, comme la tempête « Zoé » d'hier qui a donné des rafales à 150 km/h (et une température de -27,5°C, soit « mieux » que dans les Vosges en 1956).

    L'arrivée de vent est d'abord matérialisé par le mur de neige, qui est un ressaut du vent vers le haut, puis ce mur s'avance, parfois soudainement, sur la station, et c'est la tempête, avec du vent, et pire encore des visibilités lamentables, qui peuvent perdre un hivernant pour peu qu'il ne se soit pas réfugié assez vite dans un bâtiment... Le GPS (et donc retour aux instruments) peut l'aider à retrouver son chemin.

     Et là, c'est le drame (la photo améliore nettement la visibilité par rapport aux yeux des hivernants...)


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  • (♫ Puisque tu pars ♪ de Jean-Jacques Goldman…)

    Départ avec une élégance impériale (Photo : Dr Céline Dupin)Les manchots empereurs sont arrivés au Nunatak depuis près de deux mois. Et après avoir formé des couples, la femelle du couple a pondu un gros œuf. Elle le laisse à son compagnon dans un rituel actuellement guetté par Jimmy, notre ornithologue. Ce rituel est appelé « passation de l’œuf » et connaît hélas des ratés : pour peu qu'il s'échappe au moment de l'échange, les températures polaires le congèle immédiatement et irrémédiablement. Après la passation, elles quittent le Nunatak pour descendre vers l'Océan, en passant (c'est mieux) par les antennes de détection posées sur le trajet. Elles vont faire le plein de nutriments pendant deux mois. Le mâle restant va donc incuber l’œuf et poursuivre son jeûne de 115 jours commencé mi-mars, dans les conditions météorologiques les plus hostiles de la planète, en attendant le retour de sa promise vers la mi-juillet.

    Note astronomique : une petite carte postale d'Adrien qui a eu le bon réflexe d'avoir son réflex pour photographier l'éclipse de Lune du 16 mai qui était totale en France métropolitaine, mais partielle à DDU.

    15 minutes après, elle était à nouveau bien ronde... (Photo : Adrien Colomb)


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  • (♫ Sundown ♪ de Board of Canada : le lancer de 6h TU coïncide avec le coucher du soleil à DDU en cette saison)

    Campagne de mesure YOPPCette année 2022 est une année YOPP (Year Of Polar Prediction, année pour la prévision polaire), une année où l'observation et la recherche en météo met l'accent sur l'amélioration de la prévision dans les zones polaires arctique et antarctique. La dernière c'était en 2018... Notre rôle, en tant que météo de terrain, est d'effectuer trois lâchers de radiosondes quotidiens. Celui de 00h TU (à 10h locales), habituellement fait tous les jours, est doublé par celui de 6h TU (16h locales) et triplé par celui de 12h TU (22h locales). Mais nous ne sommes pas la seule base qui participe à ce projet : de nombreuses bases antarctiques sont impliquées, en commençant par les stations qui donnent le top départ de la campagne de mesure : Casey, Davis (Australie), Palmer et Mc-Murdo (USA). Elles nous ont donné un premier top du 11 au 15 mai, et nous en aurons un autre un peu plus tard dans l'année. À suivre...

    Petite note pour les multi-blogueurs : la tempête « Lucie » (plutôt son train de houle associé) a arraché la banquise à l'avant de Pétrels (l'arrière a été préservé, je peux continuer à skier...), mais vous remarquerez sur cette photo qu'elle se reforme finalement assez vite...


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